Maltraitance financière

Les personnes âgées victimes de maltraitance financière
Agnès Leclair 09/02/2011 le Figaro



Souvent spoliées par leurs proches, elles sont aussi ciblées par les sectes.

La France compte aujourd'hui environ 3 millions de personnes ayant plus de 80 ans. D'ici à 2040, elles seront 7 millions. Cette population croissante, souvent vulnérable, est de plus en plus visée par des personnes malveillantes cherchant à la spolier. Les auteurs du rapport sur la maltraitance financière à l'égard des personnes âgées rendu public aujourd'hui et remis au médiateur de la République tirent la sonnette d'alarme. Fragilisée par l'altération de ses capacités, la personne âgée, fréquemment isolée, est la victime idéale et qui plus est souvent silencieuse. Par peur, par honte, elle ne dénonce pas toujours les faits, car son «bourreau» a su se faire apprécier et exerce un odieux chantage affectif. Un silence qui rend le phénomène difficile à chiffrer.
«Les vols et escroqueries peuvent être l'œuvre de véritables prédateurs, de mieux en mieux organisés», prévient Alain Koskas, conseiller scientifique de la Fédération internationale des associations de personnes âgées. «De plus en plus, ajoute-t-il, ils appartiennent au milieu sectaire.» «Ces mouvements dangereux ont compris qu'ils pouvaient aisément vider les comptes des personnes âgées», confirme Hervé Machi, magistrat et secrétaire général de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). Dans trois rapports successifs, cette dernière a alerté les pouvoirs publics sur la mainmise grandissante des sectes sur le grand âge.
L'affaire la plus grave a eu lieu dans un établissement dans le Val-de-Marne aux mains d'un mouvement sectaire. «Il y a eu suspicion de captation d'héritage, et la justice a été saisie. L'enquête est toujours en cours», indique Hervé Machi. Plus souvent, les personnes dépendantes sont approchées par les auxiliaires bénévoles, ces personnes qui, relevant d'une association, apportent en grande majorité un vrai réconfort. Ces activités, peu encadrées, constituent une porte d'entrée en or pour les sectes. Quand elle a lieu, l'alerte vient le plus souvent des familles. Si la victime n'a plus de proches, le pot aux roses est découvert une fois les comptes asséchés.


Une visite contre un scooter


Quand les uns prétendent s'occuper des âmes, les autres assurent sauver les corps. Les psycho-guérisseurs et les pseudo-thérapeutes appartenant à des groupes à dérive sectaire poussent aussi les portes des maisons de retraite en garantissant guérison et mieux-être. Leur stratégie peut aussi être plus subtile. «Soumis à un métier stressant, les employés de ces établissements ont recours à des coachs, parfois d'authentiques gourous qui les manipulent et les poussent à piller l'argent des résidants pour leur compte», explique le magistrat.
Plus connues, les maltraitances financières intrafamiliales n'en sont pas moins insupportables. «Ce sont les plus nombreuses», avance le Pr Robert Moulias, d'Alma France (Allô maltraitance). «Les responsables des maisons de retraite sont alertés quand certains pensionnaires, ruinés par des proches, ne peuvent plus régler la facture. D'autres sont déplacés d'un établissement à l'autre car la famille veut faire des économies et cherche la solution la moins coûteuse», rapporte Alain Koskas. Les abus s'opèrent également de manière indirecte, selon Dominique Mongin, directrice régionale adjointe du groupe de maison de retraite Korian. «Quand les fratries se déchirent, les bagarres familiales entraînent des discussions sur toutes les dépenses nécessaires pour la personne âgée», explique-t-elle . Les abus financiers se nichent aussi dans les détails. Les professionnels de la prise en charge de la dépendance le savent. Des proches se font invariablement inviter par la personne âgée. D'autres conditionnent leurs visites au paiement d'un nouveau scooter, de vêtements… «Certains tuteurs peu attentifs se débarrassent parfois sans considération des affaires personnelles des personnes âgées. Des indélicatesses dont elles peuvent mettre longtemps à se remettre», ajoute Dominique Mongin. «La vigilance s'est tout de même renforcée depuis une dizaine d'années. Avant, tout le monde intervenait sur les comptes de la personne âgée!» nuance cette dernière.


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